L’histoire de l’art reconnaît une dissociation claire de deux tendances artistiques : l’art figuratif et l’art abstrait.
L’abstraction consiste en une émancipation totale de la forme et l’abandon définitif de la représentation du réel. L’imitation de la nature ou d’une réalité concrète n’est plus ce qui est recherchée par les artistes abstraits. La peinture alors dénuée de toute référence au réel permet de devenir le support d’une idée conceptuelle et de devenir le vecteur d’émotions et une source d’interprétations plurielles. L’abstraction se définit alors par l’absence d’élément reconnaissable et identifiable.
L’évolution des formes et des ruptures successives face à l’art classique ont amené les artistes à une épuration de la forme et l’avènement d’une peinture abstraite, dénuée de tout mimétisme. Les impressionnistes ont annoncé le triomphe de l’abstraction au 20ème siècle en abandonnant la représentation parfaite de la nature au profit de la sensation. Ainsi, les avant-gardes se sont nourris de cette épuration première et ont poussé la tendance à l’effacement de la forme et l’abandon de la représentation du réel à son paroxysme pour placer l’idée et le concept au centre de la création.
Le cubisme, le futurisme et le fauvisme annoncent les prémices de l’abstraction. La forme s’efface, la ressemblance au réel s’amenuise et la lecture de l'œuvre se complexifie. Les compositions de Pablo Picasso, de Fernand Léger ou de Marcel Duchamp s’éloignent de plus en plus du réel et tendent vers une certaine abstraction.
Les historiens de l’art reconnaissent à Frantisek Kupka et Wassily Kandiksy la naissance de l’abstraction à la suite de la révolution picturale qu’ils initient. Dans son essai « Le spirituel dans l’art » datant de 1910, Kandisky énonce les fondements de l’abstraction. L’année 1912 constitue alors un tournant majeur dans l’avènement d’une abstraction et marque l’aboutissement des recherches sur la décomposition de la lumière et du mouvement.
Mais l’abstraction est un art qui émerge à la veille de la première guerre mondiale et qui va se développer pendant cette époque pour s’exprimer dans toute sa splendeur dans la décennie de 1916 à 1925. À ce moment, les avant-garde poussent l’abstraction jusqu'à son paroxysme en produisant des formes radicales et absolues dont l’expression la plus entière réside dans le monochrome. Kazimir Malevitch présente en 1918 son oeuvre Carré suprématiste : blanc sur blanc et se positionne comme la nouvelle figure de l’abstraction. Il souhaite revenir à une simplicité de la forme et se distancie drastiquement de toute représentation de la nature. Malevitch déclare alors le suprématisme comme la création absolue et proclame le carré comme la forme pure et le visage de l’art moderne. Le plan pictural devient une figure autonome mais qui, contrairement aux apparences, aucune de ces formes n’est parfaite ou rigoureusement centrale. Les recherches picturales de Kandisky et Malevitch annoncent une nouvelle ère artistique et proclament l’abstraction comme un art du dépouillement et du silence.
L’abstraction géométrique s’impose par la suite, portée par l’art de Kupka et Piet Mondrian. Cette nouvelle abstraction place les formes géométriques et l’épuration au centre de la toile. Mondrian opère une réduction drastique de la forme et conduit une réflexion sur la ligne, la couleur et sur le sens des formes. Mondrian disait ne pas vouloir reproduire en peinture les apparences de la nature. Le carré, le triangle, les lignes deviennent les éléments principaux qui se déploient et se répondent sur un espace bidimensionnel. À ce moment, la couleur devient une place fondamentale dans l’abstraction en ce qu’elle procure des sensations et provoque une vibration psychique à l'œil.
En opposition à l’abstraction géométrique qui s’impose aux États-Unis et plus tard en France, une abstraction lyrique s’exprime à travers les courants de l'expressionnisme abstrait, du Color Field painting ou le tachisme d’Hans Hartung. Les artistes abstraits considèrent le but ultime de l’art comme l’expression des sentiments et l’énonciation d’une vérité supérieure.
La peinture moderne a atteint son plein épanouissement avec l’abstraction dans le sens où elle n’existe plus que pour elle-même. L’épuration des formes et l’abandon de la représentation du réel n’est que la réponse logique au désintérêt des artistes pour la redondance des sujets. C’est cette nouvelle abstraction du début du 20ème siècle qui prépare l’avènement de l’art des néo avant-gardes et de l’art minimal et conceptuel.
L’abstraction reste encore aujourd’hui appréciée des amateurs d’art et s’est diffusée largement dans la pensée contemporaine.
Le réservoir offre de nombreuses peintures abstraites, celles des artistes tels que Jean Rouzaud, Claude Viallat ou encore Pierre Malbec.